Le chantier Tsukino [team Tsukino]

Tout avait commencé le jour où Aiko avait emmené Kiralee dans sa maison d’enfance. Elle lui avait confié que ses grands-parents avaient fait de Natsuki l’héritière de la maison familiale et qu’elle en est la propriétaire officielle depuis ses 18 ans. Kiralee avait fait un commentaire très pertinent « Tu es certaine qu'elle le sait ? J'ai jamais entendu Natsu en parler et pourtant je peux te dire qu'elle jacasse ta sœur! Alors soit elle l'ignore, soit elle a oublié !». Et la danseuse avait vu juste puisque quand Aiko avait eu une discussion avec son ainée sur le sujet, cette dernière en était presque tombée de sa chaise.

Après la surprise, Natsuki eut un élan de motivation et de détermination à récupérer son bien. Elle avait fait toutes les démarches administratives pour et après plusieurs semaines d’attente était officiellement propriétaire de la maison familiale. Aiko dû calmer l’ardeur de sa sœur qui prévoyait déjà d’y emménager avec Nina, en lui mentionnant que la maison n’était actuellement pas habitable. En fait, elle était quasiment en ruine. Nouvel élan de motivation de Natsuki qui prit la décision de la rénover avec l’aide de sa sœur. Aiko se laissa embarquer par l’enthousiasme de sa sœur. Les deux s’étaient rendus sur le chantier pour commencer les travaux sans vraiment savoir quoi faire. Elles s’étaient dit qu’elles apprendraient sur le tas et avec l’aide de tuto sur internet.

Kiralee s’en était mêlée, plus par moquerie qu’autre chose, mais les sœurs se contentaient de l’ignorer. C’est alors qu’un jour Kiralee avait envoyé une vidéo des sœurs sur le toit à Riley, en se moquant encore une fois d’elles. La rousse avait débarqué à la vitesse de l’éclair les sommant de descendre immédiatement. À peine eurent telles rejoint le sol qu’une partie du toit s’effondra. La Canadienne leur fit un sermon avant d’annoncer qu’il valait mieux raser la bâtisse. Ça avait blessé Natsuki, Aiko avait demandé conseil et aide. Après une inspection, il avait été remarqué que les fondations étaient encore bonnes, qu’il fallait réparer la toiture et réaménager l’intérieur. Projet que Riley trouvait faisable.

C’est ainsi que les quatre femmes en vinrent à passer du temps ensemble et à développer une amitié de chantier. Aiko appelait Lucie de temps en temps pour avoir des conseils (elles avaient gardé contacte après le mariage) et les sœurs Brandt furent d’une grande aide pour les Tsukino. Mais l’hiver arriva, puis Riley eut son accident. Mettant le chantier sur une longue pause.

Ce qui nous ramène au moment présent. C’était le week-end et Aiko s’était levée déterminée. Les beaux jours étaient de retour et le chantier pouvait reprendre. Même si Riley était hors-jeu, elle pouvait toujours continuer à avancer avec sa sœur. L’hiver leur avait permis de travailler davantage pour renflouer leur budget pour la maison.
L’athlète s’était donc rendu dans la chambre de sa sœur pour la motiver à reprendre le chantier. Elle ouvrit la porte avec fracas, se moquant de déranger ou non son ainée.

« Natsu ! Notre devoir nous appelle ! Nous devons reprendre notre quête pour bâtir notre avenir ! »

Aiko eut un moment de surprise en découvrant sa sœur en position de Sirasana, nue comme un ver. Elle referma rapidement la porte derrière elle pour ne pas attirer les curieuses levées de bonne heure. Natsuki avait décidé de renouer avec sa spiritualité et avait embarqué sa sœur dans l’idée. D’abord sceptique, Aiko s’était laissé prendre au jeu et avait trouvé paix et réconfort dans la méditation.

Toutefois, elle laissa un soupir d’agacement sortir de sa bouche. Elle n’avait pas spécialement envie de poireauter pendant une demi-heure (oui 10 minutes de yogas, 5 minutes pour qu’elle s’habille et 15 si ce n’est plus pour manger). Elle ne partagea toutefois pas sa pensée, sachant qu’il ne servait à rien de débattre, Natsuki n’irait pas plus vite.

"Je pensais que tu faisais tes séances de "hot" yoga avec Nina."

La cadette se laissa tomber sur le lit de sa sœur, prenant un manga au hasard d’une pile qui trainait au sol. Elle n’était pas vraiment concentrée sur sa lecture, mais préférait garder ses yeux occupés sur les pages du livre, plutôt que sur sa sœur qui gesticulait dans sa tenue d’Ève. Elle avait grandi avec, alors elle était habituée, mais ça la surprenait toujours autant de voir à qu’elle point elles étaient différentes. Aiko était très pudique, tout le contraire de sa sœur qui se sentait plus à l’aise avec rien sur le dos. En vivant à la villa, l’athlète avait découvert que d’autres personnes partageaient cet amour pour l’exhibitionnisme.

Elle attendit sagement, bouquinant sans faire la moindre remarque. Elle finit par lâcher le manga pour le remplacer par son téléphone. Elle regarda la météo, effectua des recherches sur les tâches et travaux qu’elles pourraient faire aujourd’hui. Quand sa sœur fut finalement prête, elle se leva d’un bon, prête à partir.

« On peut y aller en bus. Kira ne pouvait pas me prêter sa voiture. Riley m’a passé les clefs de la sienne la sienne, comme elle ne peut pas l’utiliser, mais je ne sais pas si je peux faire confiance à son vieux tacot… »

Aiko releva un sourcil et le nez de du manga pour regarder un instant sa sœur. Comme ça elle dégageait des ondes négatives ? Elle était troublée c’était certains, après tout ce qui s’était passé ces dernières semaines. Pourtant, elle ne se sentait pas particulièrement morose au point que cela soit détectable. Natsuki la connaissait trop bien. Elle reporta son regard sur le livre et tourna une page.

« Je ne pensais pas que c’était si flagrant. J’ai quelques trucs qui me tracassent, effectivement. »

Elle avait hésité à nier, mais elle savait que ça ne servait à rien. Sa sœur n’aurait pas insisté, mais elle se serait fait du souci. Et Aiko n’aimait pas que Natsuki s’inquiète trop pour elle. Elle-même ne savait pas trop pourquoi elle se sentait plus morose en ce moment. Certes, la mort de Silver l’avait chamboulé, mais elle avait la chance d’être entourée et soutenue, encore plus depuis qu’elle avait retrouvé Ayano. Pendant une fraction de seconde, son mental lui fit voir un éclat doré, mais elle chassa cette pensée aussi rapidement qu’elle était venue. Son cœur s’emballa légèrement. Non, ça, elle n’en voulait pas dans sa tête en ce moment. Elle ferma une seconde les yeux pour reprendre le contrôle de ses émotions. Cela devenait de plus en plus compliqué de les étouffer.

Elle n’en ajouta pas plus pour le moment, laissant sa sœur finir sa séance et se préparer. Elle s’était attendue que cela s’éternise, mais non. Natsuki fut rapidement prête et avala une barre de céréales comme petit déjeuner. Aiko fronça légèrement les sourcils en l’observant.

« Tu es sûr que ça va te suffire ? On peut aller déjeuner au réfectoire tu sais, ça ne me dérange pas. »

La sportive se releva du lit et s’étira les bras avant de suivre sa sœur à l’extérieur de sa chambre. La Japonaise s’arrêta un instant en regardant sa sœur avec incrédulité.

« Comment ça, « encore »?? Natsu c’est grave il faut que tu dénonces ces connards ! »

Une chance qu’elle n’eût pas été là. Le responsable aurait fini avec un bras en moins. C’était quoi leur délire à ces vieux pervers, si elle pouvait, elle les ferait tous enfermer. Mais malheureusement, ils arrivaient toujours à s’en sortir.

« Va pour Scarlet alors. »

« Je me fais du souci pour Sleï. Elle est toute seule maintenant que Silver est … partie. J’aimerais l’aider plus, mais en même temps, je dois gérer mes cours et mes entrainements. J’aimerais passer plus de temps avec Sara aussi, on ne s’est pas revu depuis notre journée improvisée. Mais en même temps c’est bien que je garde une certaine distance, je pense. C’est pareil avec Aya, je n’ai pas pu la revoir. J’aimerais ça pouvoir me décupler parfois et ne rien manquer. Bref, je me sens un peu dépassé et je ne sais pas comment faire pour retrouver mon équilibre des derniers mois. »

Ce n’était pas insurmontable non plus, mais elle avait son deuil à gérer dans tout cela. Même si elle ne le montrait pas, elle était triste. Elle avait justement envie de voir Sara parce que l’Allemande réussissait à lui changer les idées. Toutefois, quand elle repensait à leur dernier moment ensemble, son cœur s’emballait et elle devait refouler ce qu’elle ressentait. Hors de question qu’elle ajoute du drame sentimental dans son agenda. Elle n’allait cependant pas pouvoir l’ignorer indéfiniment. Elle ne voulait pas de faire de la peine à la cavalière et même si elle repoussait cette idée, elle avait besoin de la voir aussi.

« Bonne idée pour les crêpes ! »

Au moins, passer cette journée avec sa sœur lui permettrait de mettre un peu ses tracas de côté. Elles se rendirent jusque dans la voiture que Natsuki salua chaleureusement avant d’embarque.

« Justement, ce n’est pas normal que l’on puisse ne rien faire ! »

Ce genre de chose l’enrageait. Si elle voyait une personne poser une main malveillante sur sa sœur, elle n’était pas certaine de pouvoir se retenir de lui rentrer dedans. Elle conduisait tranquillement et avec prudence. Elle eut un sourire en entendant le commentaire de sa sœur.

« Je sais, cette fille est un vrai paquet de nerf. Tu devrais essayer de la convertir à la méditation aussi ! »

Aiko se gara à l’endroit indiqué par sa sœur et la suivit à l’intérieur de l’établissement. Les propriétaires les saluaient chaleureusement et Aiko se courba poliment. Elle s’installa ensuite en face de sa sœur. Elle ne put s’empêcher de rire en voyant qu’elle semblait être une habituée.

« Est-ce qu’il y a un restaurant en ville ou tu n’es pas connue ? »

Elle lança un regard taquin à sa sœur avant de le porter sur le menu. Elle commanda deux pancakes accompagnés de fruits. Elle reporta ensuite son attention sur sa sœur.

« Et toi alors ? Quoi de neuf ? »