Run baby, run [Libre]

Masae s'était enfuie de sa chambre de bon matin, pourquoi enfuie ? Parce qu'elle n'avait pas envie qu'Iwa lui fasse une interview trop personnel de la semaine. La japonaise était bien trop curieuse alors que la lycéenne en art aimait bien garder son petit jardin secret, secret justement. Elle avait donc enfilé un pantalon, des chaussures confortable et son inséparable pull à capuche pour aller vers l'extérieur se trouver un joli coin pour dessiner.

Le soleil qui venait rayonner sur son visage était agréable et elle emplit ses poumons d'air frais. Le printemps, avec les oiseaux qui chantent et qui font des acrobaties aériennes. Eux, sont complétement libre, sans aucune attache. La nippone pensait très souvent à ses grands-parents qu'elle avait laissé derrière pour venir étudier à l'académie, est-ce qu'ils allaient bien ? Si elle avait été un petit oiseau, elle se serait empressée d'aller vérifier elle-même. Hélas, ce n'était pas le cas, elle restait solidement clouée au sol et ne pouvait que supposer qu'ils se portent bien.

Ma lycéenne aimait le calme et surtout passer totalement inaperçue, jusqu'ici, il n'y avait qu'une seule personne qui la remarquait toujours et c'était Ruby. Elle avait prit son carnet de croquit et une trousse contenant crayons et gomme et maintenant, il ne lui restait plus qu'à marcher vers l'écrin de verdure qu'offrait le parc avec ses nombreux recoins d'inspiration. Lorsqu'elle était entrain de dessiner, la japonaise était imperturbable, dans sa bulle et elle pouvait y rester des heures sans même se rendre compte du temps qui passait.

Elle se rendit vers la fontaine, les alentours étaient complètement désert et elle s'assit sur un banc pour sortir son carnet et commencer à dessiner. Lentement, son croquis, l'image prenait forme, rajoutant des détails, des ombres. Elle inventa deux oiseaux imaginaires posés sur le rebord qui se chamaillaient et puis elle entendit le bruissement des chaussures de quelqu'un qui court sur du gravier mélangé à de la terre. Elle la suivit du regard, rabattant sa capuche pour la regarder passer en espérant qu'elle ne la remarquerait pas. Elle s'était comme figée reposant son regard sur le sol, si elle ne bougeait pas , qu'elle ne respirait pas et qu'elle n'avait aucun contact visuel avec elle, elle l'ignorerait tout simplement.

Sa main avait été prise d'un spasme et son carnet avait dégringolé de ses genoux alors qu'elle s'était précipitée pour le ramasser, trop tard, il était tombé sur le sol.

Elle était restée penchée et avait remarqué deux pieds qui ne lui appartenaient pas arrêtés tout prêt des siens. Elle avait vu une main se baisser pour attraper son carnet et resta immobile avec son geste en suspend. Elle pensait sans doute que l'acuité de cette jeune-femme se faisait sur le mouvement comme ce grand dadet de tyrannosaure dans le célèbre film de Stevens Spielberg.

Elle se redressa en ne sachant où aller se cacher bien trop timide pour dire ou faire quoi que ce soit et surtout pas après ce beau compliment. Elle saisit délicatement les bords de son carnet et secoua sa tête rapidement pour faire un oui tout en restant silencieuse. Le regard vert de la lycéenne coula sur la jeune fille comme si elle avait cherché à l'enduire de miel. Ce qu'elle pouvait en dire, caucasienne, européenne ou américaine sans doute, grande, très fine, aucune poitrine, épaule et jambes musclées, cheveux très tiré en arrière. La seule image qui lui venait en tête en l'ayant vu récupérer son carnet et se redresser avec c'est que c'était une danseuse, ça lui était immédiatement venu à l'esprit même si elle ne pratiquait pas la danse.

- M Me Merci

Le ton de sa voix était à peine posé, à peine murmuré comme un fantôme qui n'existe pas vraiment ou qui veut garder son existence secrète plutôt. Il fallait qu'elle trouve quelque-chose à lui dire et vite pour ne pas avoir l'air ennuyeuse à mourir.

- Toi aussi tu tu tu es de de là-bas ?

La nippone avait parlé un petit peu plus fort même si le volume était encore très bas et automatiquement, elle se sentait ridicule de poser cette question rhétorique dont elle connaissait déjà la réponse. On ne croisait pas énormément d'étranger dans cette ville si ils ne faisaient pas partie de l'académie ou plus globalement du monde élitiste des artistes ayant percés. En quelques-années cette denrées rares de la population avait élu domicile au sein de cette ville et l'avait même fait s'agrandir avec de nouveaux immeubles et complexes.

- Je m' suis Masae et toi ?

Masae avait bien deviné et elle avait vu dans le mille concernant Nina, elle était de la Yuri-academia, dans le même cycle qu'elle, mais en danse pour sa part. La dessinatrice en herbe secoua la tête de gauche à droite plusieurs fois de suite tout en fixant un point au sol.

- Je suis en dessin et en troisième cycle

Nina avait tout de suite comprit, la timide Masae n'avait pas d'autre talent que le dessin. Elle savait devenir transparente puisque personne ne la remarquait. Presque personne, habituellement, elle arrivait à se soustraire à la vue de tout le monde quand Iwa ne criait pas après elle dans toute l'académie ou quand elle ne la remorquait pas bruyamment jusqu'à la salle de classe.

- Je je... enchan... enchantée Ni...NINA !

Masae avait eu du mal à dire son prénom, ça l'avait rendu nerveuse soudainement. Elle ne parlait pas beaucoup et la plupart du temps, il fallait vraiment lui sortir les vers du nez pour qu'elle fasse entendre le bruit de sa voix. Dernièrement, elle avait au moins franchit une grande étape et elle posait des questions sans qu'on le lui souffle.

- Euh... Je suis arrivée il y a 11 mois

Ces questions c'était trop pour elle. Elle était en panique totale, sur le qui-vive et prête à s'échapper. Pourquoi Nina le lui demandait ? pourquoi pas à quelqu'un d'autre de plus chaleureux et de plus ouvert ? Qu'est-ce qu'elle devait répondre? Qu'est-ce que la danseuse voulait entendre ? Elle écarta les bras en signe qu'elle ne savait pas.

- J'ai...je...je...je ne sais pas !

Masae devait se forcer, si elle ne sortait jamais de sa réserve, elle serait à jamais une petite souris incapable de s'adresser en public. Qu'est-ce qu'elle pouvait dire sur l'académie ?

- Elle...est grande et les élèves se tiennent bien pour la plupart et les professeures sont très douées

Ne pouvait-elle pas ajouter quelques commentaires en plus, Nina n'allait probablement pas être satisfaite pas aussi peu d'informations.

- C'est une école très stricte, le matin les uniformes sont vérifiés dès l'entrée par la directrice qui n'hésite pas à remettre à l'ordre les élèves ou à les punir si elles récidivent, les chambres des dortoirs sont inspectées chaque semaine et c'est à nous qu'incombe la tâche de nettoyer notre dortoir le week-end.

Masae sentait que Nina l'écoutait avec attention, probablement plus par politesse et gentillesse que par réel intérêt pour les informations qu'elle lui donnait. La japonaise ignorait ce que la danseuse voulait entendre exactement, elle ne savait pas vers où elle devait aller. Aussi, elle s'était reculé lorsqu'elle l'avait vu se mettre à genoux et avait fait l'effort de parler à un volume sonore un peu plus conséquent même si il restait assez bas.

La mère de Nina était stricte alors ? Masae ne connaissait pas réellement sa mère, mais son grand-père était très stricte et il n'avait pas voulu qu'elle vienne à l'académie. Est-ce qu'il était encore fâché parce qu'elle l'avait fait dans son dos ? Depuis qu'elle était à l'académie, elle n'avait pratiquement aucune nouvelle de ses grand-parents. Elle savait la santé de sa grand-mère très fragile.

Nina ne la dérangeait pas vraiment, c'était trop gênant pour Masae de parler mais il fallait qu'elle le fasse. Elle la regardant, regarda ses pieds plutôt pour ne pas à la regarder dans les yeux.

- No.. non tu.. tu ne me gêne pas.. pardon je n'ai pas l'habitude de parler aux gens, désolée .. ne m'en veux pas.. je répondrais à toute.. toute tes questions